9 | Covid 19 Journal d’une Fleur dans les Terres Australes | Goodbye Australia 2

La dernière image que j’aurais de l’Australie sera l’aéroport d’Alice Springs et son sol en moquette illustrant des peintures aborigènes. La mythologie aborigène veut que le monde dans lequel nous vivons ne soit qu’un « rêve » (à noter que cela n’est que ma vulgarisation ou simplification d’une mythologie qui ne saurait être résumé en une phrase), je n’ai pas de mal à m’imaginer comment cette réflexion a pu se développer dans les mentalités aborigène ici, au centre géographique de l’Australie. Et bien, si toute cette aventure n’était qu’un rêve des dieux, je ne serais pas celle qui ira les réveiller.

Les derniers adieux (que l’on espère transformer en « au revoir ») se sont fait rapidement,un « bon voyage » murmuré au creux de l’oreille lors d’une accolade maladroite, une carte postale glissée dans nos mains par notre ami du Bangladesh. Sur la mienne il avait écrit: « Elisa, Wish for the best, you Will be fine » . C’est en lisant ces mots que je réalisa que ce qui n’était initialement qu’une connaissance était devenu un ami, un ami qui par ailleurs, m’avait très bien cerné.

 Quand le ventre est plein, les oiseaux chantent et les hommes rient.

Proverbe Australien

Quand finalement l’avion quitta la terre ferme, cette terre rouge, propre au désert de l’Outback, je sentis mon cœur chuter dans ma cage thoracique, comme si celui-ci, désireux de rester au sol un peu plus longtemps exprima son dernier caprice. Le vol se déroula en un éclair, nous avons décollé au beau milieu de la « golden hour » et avons atterri à Sydney au crépuscule. Je n’ai jeté qu’un regard à travers le hublot. Notre plan en arrivant à Sydney était, initialement, de passer nos 24h d’escale dans l’aéroport et y installer un nid d’appoint avec notre matériel de camping, afin d’économiser nos derniers dollars. Nous ne nous doutions pas de l’accueil glacial qui nous était réservé, ni, par ailleurs, qu’il était formellement interdit aux voyageurs de patienter au sein de l’aéroport plus de quatre heures avant leur vol : C’est ainsi que nous nous sommes retrouvés, mon copain et moi à passer la nuit dans un hôtel quatre étoiles non loin de l’aéroport. L’absurdité de la situation nous a bien fait rire mais ça n’a pas été suffisant pour masquer cette drôle d’impression que nous avions de faire tache dans le décor. En y réfléchissant maintenant, ce sentiment n’était pas justifié. Nous venions de la ville aux miles et une étoiles, qu’est ce qu’un simple hôtel avait de plus à offrir?

A l’image du premier vol, le reste de notre voyage est passé très vite. Quelle injustice. Les vols retour ont toujours l’air bien plus courts que les vols aller.
Je ne suis pas parvenue à fermer l’œil durant ces 50 heures de voyage, hantée par l’idée insoutenable que j’abandonnais une partie de moi au beau milieu d’un désert australien.

Australie Outback Lightning Ridge Bush – @pixabay

8 | Covid 19 Journal d’une Fleur dans les Terres Australes | Goodbye Australia

Flash Back

La vérité, c’est qu’on est jamais assez préparé pour le changement radical. On peut s’imaginer de multiples scénarios hypothétiques et s’y voir les traverser sans turbulences, mais ce n’est pas, ne sera jamais un entrainement suffisant pour « la vraie vie » Il s’agirait plus tôt de se jeter sur le terrain à corps perdu, vulnérables, mais fort de cette vulnérabilité. Je n’étais pour ma part certainement pas prête à quitter l’Australie de manière aussi précipité, ni d’écrire le point final de la plus folle aventure de ma vie.

C ’est alors que le jour J, le jour décisif du départ d’Australie a sonné le 10 avril 2020, un mois plus tôt que la date initialement prévue du départ. 10 heures avant le décollage, mon sac n’était toujours pas fait, les derniers préparatifs n’étaient toujours pas amorcés. Seuls ces fameux scénarios imaginaires occupaient mon esprit.

La veille du départ, nous étions tous autour d’un énorme feu de bois à écrire nos vœux et rêves sur des morceaux de papier, pour ensuite les jeter dans le brasier, le laissant ainsi se charger de nos destinées. Je me rappelle penser: « C’est ainsi que tout le monde devrait s’occuper de ses rêves. » Un rêve ne devrait être rien d’autre qu’une étincelle flamboyante capable de déclencher un brasier. Ce soir là, le dernier soir en Australie, mon souhait n’était pas pour moi mais pour toutes les personnes également assises autour du feu. Le lendemain il ne restait qu’une odeur entêtante de cendre sur nos vêtements et le sentiment amer que nous étions bel et bien à la fin de ce que fut un vœux.L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est feu-australie-covid-576x1024.jpeg.

« C’est ainsi que tout le monde devrait s’occuper de ses rêves. »

De la nuit au jour, tout avait changé. Des expressions sur les visages, jusqu’aux discussions. Le matin venu, chaque conversations semblaient en dissimuler une autre. Les « Vous avez commencé à faire vos sacs? » voulaient dire « alors ça y est, vous allez vraiment le faire, vous allez vraiment partir » et nous pouvions percevoir des « vous allez nous manquer » chaque fois que la question : « à quelle heure est votre vol ? » nous était posée. Ainsi la nostalgie d’un passé-présent avait envahit notre paradis sur terre, l’innocence propre à Alice Springs se dissipait au fur et à mesure que l’heure des « au revoir » approchait. Quand l’heure du départ fini par sonner plus tôt que prévue (car notre vol avait été avancé d’une heure), je ne pouvais m’empêcher de penser que c’était l’Australie qui nous chassait à grand coup de pieds, une fois de plus, mais de manière décisive cette fois-ci. Il est vrai que durant cette année à appeler l’Australie « ma maison » celle ci ne m’avait pas épargnée. Un ami indien rencontré à Alice Springs m’avait dit un jour : « L’Australie est ta nouvelle maman. Elle va te tester, te faire regarder au plus profond de toi- même, pour finalement t’accepter au creux de ses bras jusqu’à ce qu’il soit temps pour toi de repartir, et de tout recommencer »

C’est ainsi que mes dernières heures en Australie se sont déroulées. Dans une tempête de souvenirs et d’émotions insoupçonnées, surgissantes, semblables à la tempête de sable qui m’avait accueilli lors de mon premier jour à Alice Springs. Tout était flou, tout tournait vite autour de moi, mais il aurait fallu être aveugle pour ne pas voir la rare beauté de ce moment.

A bientôt, Mama Australia.

L’Outback, Alice Springs se trouve exactement au centre du continent australien.

7 | Covid 19 Journal d’une Fleur dans les Terres Australes | Retour acte 3

Une nuit réparatrice et c’est reparti pour la suite de ce voyage de retour en France. A l’hôtel c’est le service minimum, piscine et salle de musculation fermé. Etant désœuvrés à l’hôtel autant rallier l’aéroport de Sydney Kingsford-Smith, même si le vol n’est prévu qu’en soirée.

Il est 14h et si ce n’était la lumière du jour on aurait pu se croire en pleine nuit à l’heure des derniers vols. Seuls six vols sont affichés, dont le SYDNEY DOHA. Quasiment personne dans l’aérogare, excepté quatre ou cinq pvtistes désœuvrés, essayant de passer le temps en jouant à la trottinette version porte-bagage, accompagné de mouvements dignes de la danse classique… Allez on va compter les derniers dollars Australiens, cela permettra d’acheter des lingettes désinfectantes, et des gâteaux, cet argent ne servira plus à rien dans quelques heures.

L’enregistrement du vol ouvre enfin, les contrôles se passent avec des longueurs (appels à l’Ambassade) pour les Italiens qui transitent à Paris, plus facilement pour les Français. Beaucoup de passagers sont stressés dans la salle d’embarquement et pourtant tous les feux sont au vert, si ce n’est bien sûr ce virus. Le vol de 15 heures aura lieu à bord d’un appareil tout neuf de la QATAR AIRWAYS, un Airbus A350-1000 de dernière génération : des hublots plus grands, une altitude ressentie à bord plus basse, une hygromètre plus élevée en cabine, des tablettes individuelles de dernière génération : de quoi traverser une bonne partie de la planète confortablement.

Une escale au Doha Hamad International Airport en fin de nuit les attends, après 07 heures de décalage horaire négatif, histoire de rajeunir un peu. C’est un accueil Arabique qui a perdu son authenticité, puisqu’à base d’effluves de désinfectants, au lieu des essences locales typiques. Lawrence d’Arabie est mis entre parenthèses pendant le Corona Virus. Pouvoir se dégourdir un peu les jambes, c’est agréable en cours de voyage.

Impossible de passer un coup de fil depuis l’aéroport en Whatsapp, étonnant pour une infrastructure classée 5 étoiles SKYTRAX.

Enfin le vol direct vers Paris, en 06H30, et un décalage horaire résiduel de 1 heure. Cette fois ce sera à bord d’un Boeing 777-300 ER de deux ans d’âge : Une belle machine mais de génération précédente.

Doha Hamad International | Qatar

6 | Covid 19 Journal d’une Fleur dans les Terres Australes | Retour acte 2

Le téléphone sonne à 06H00 du matin, heure de France : C’est ma fille des terres australes en visio : Un ami devait prendre un vol à 13H00 qui a été annulé. Elle : Est ce que tu as reçu à tout hasard des infos pour le notre, ce soir ? La tête dans le col-tard (cette expression existe encore?), je rassemble en une seconde mes neurones, éparpillés dans un douillet champs de coton. Très technique, la seule chose à faire, lui dis-je, regarder son dossier sur le site de la compagnie. Les astres étaient avec nous : son instinct, ou son 6ème sens à bien œuvré ! Son vol pour Sydney est avancé d’ 1 heure 30 ! Pas d’annulation pour eux.

Là-bas dans le Northern Territory, un jeune couple précipite son départ vers l’aéroport provincial. Un pote à pu se libérer en dernière minute pour les véhiculer à l’aéroport d’Alice Springs. Un coup d’œil rapide à internet m’informe que son vol est en route de Darwin vers Alice Springs, puis redécollage pour Sydney, avec eux à bord, en tout cas nous l’espérons ! Nous attendons un Whatsapp salvateur, car s’ils loupent le vol, bonjour le boulot pour rattraper tout ça… à l’aide d’une carte de crédit sans doute.

C’est une visio salvatrice qui nous rassure enfin : après avoir passé deux checkpoints militaires spécial covid19, les voilà à l’aéroport : Tranquilles (enfin) relax… dans un bâtiment anormalement désert, au sol recouvert de peintures Aborigènes. C’est un Boeing 737, 9 ans d’âge, qui va les transporter vers Sydney, deux heures trente de vol plus loin. A bord un siège sur deux est neutralisé pour les protéger de ce virus… Un confort Business Class sans le vouloir (Sans la coupe de champagne végan)

Arrivée dans une ville de SYDNEY confinée, leur escale durera 24 heures. A l’aéroport on leur signale qu’il est interdit de rester si le vol est dans plus de 04 heures. Plan B activé : au lieu de dormir à l’aéroport en vrais Backpackers, direction un hôtel 4 étoiles à proximité, à prix ultra négocié, day use le lendemain inclus ( ils sont débrouillards les petits) . Impossible de pointer son nez hors de l’hôtel, la police est là et vous demande pourquoi vous sortez ! En tout cas les conditions s’annoncent bonnes avant la grande envolée de demain.

C’est un vol de 15HOO qui les attend, à bord d’un avion ultramoderne, puis une escale dans les pays du Golf, et enfin un « petit » vol de 06h30 pour rejointe la France.

Allez bonne nuit et à demain pour la grande envolée.

5 | Covid 19 Journal d’une Fleur dans les Terres Australes | Retour acte 1

Aujourd’hui c’est la veillée d’armes pour les parents aussi. Pour eux c’est les adieux, ou plutôt les « au revoir », car ce n’est pas définitif, qui commencent sans doute. Leurs amis d’aventures sont de différentes nationalités et cultures, réunis là-bas : Un fort parfum « d’Auberge Espagnole », dans leur Sharehouse, mais à plus de 16000 Kilomètres de la maison. Ils ne sont pas ERASMUS mais VISA VACANCES TRAVAIL, en sachant que la partie travail est prédominante bien sûr. Inclus quand même un dépaysement de 15 jour lors d’une escapade à Bali, pas mal non ?

Donc demain avec 08 heures d’avance sur nous, notre couple de Backpackers va commencer son voyage de retour en Europe, à travers 08 fuseaux horaires, dans le sens ou on rajeuni ! Bonne nouvelle 🙂

Départ tout d’abord du NORTHERN TERRITORY, Alice Springs, sur un vol régulier de la compagnie au Kangourou vers SYDNEY (un vol un peu plus long qu’un PARIS ATHENES).

Escale imprévue de 24 heures, car la compagnie aérienne a changé les horaires de vols sur les tronçons internationaux. Ensuite, et bien, envolée de 16 heures vers les Emirats puis Paris.

Barcelona

A demain pour la suite de l’envolée vers l’Europe sous COVID (ce n’est une drogue !)

4 | Covid 19 Journal d’une Fleur dans les Terres Australes

Il est temps qu’elle rentre à la maison, même l’ambassade de France est d’accord : Dommage elle a déjà perdu son billet Etihad ( il y a une semaine de cela !), et en plus, nous lui avons avancé un billet d’avion la semaine prochaine… Pourquoi l’Ambassade communique si tardivement ? Pour ceux qui doivent prendre un vol intérieur, c’est compliqué, ou alors elle n’est pas considérée comme prioritaire 🙁 (suivez ce lien)

Et oui, la situation en Australie ne s’arrange pas question travail avec le COVID19, ce qui contrarie ses projets de retour initiaux. Tous deux (avec son conjoint) avaient un travail, et le plan initial était de terminer la 1ère année de Visa Vacances Travail, de faire des économies, et de rentrer en France avec un petit pécule.

Aujourd’hui c’est un retour anticipé de trois mois qui les attend, avec des frais de retour sans commune mesure avec ce qui existait « avant guerre » (expression de notre président). Les sites internet qui proposent des vols ont une offre qui s’est réduite comme peau de chagrin : hier quand elle a réservé son billet retour, QATAR AIRWAYS était le seul choix ! Une très bonne compagnie aérienne au passage. L’Ambassade sur place à négocié 10% de réduction avec eux, en entrant le code : « travel home » évocateur et rassurant.

Un trajet de 45 heures l’attend, depuis le Northern Territory Australien. Le vol le plus fabuleux (des 3 nécessaires) sera de 14 h 55 min entre Sydney et Doha : Nous ne sommes pas loin des vols les plus longs du monde !

Sa seule crainte est de se retrouver avec un 2ème billet acheté… et peut-être une compagnie aérienne qui annule à son tour ses rotations quasiment en dernière minute. Emirates et Etihad sont bien aux abonnés absents maintenant, comme beaucoup d’autres compagnies. On constate que les vols aujourd’hui ne sont pas remboursés, mais réutilisable sur la même compagnie… qui ne vole plus ! Imaginez la catastrophe si cette mésaventure lui arrive deux fois de suite ?

Quand on sait, en plus, qu’aujourd’hui l’aéroport de Roissy Charles de Gaulle à le trafic d’un petit aérodrome de province, avec seulement 17 compagnies qui opèrent , c’est juste dingue. (et Orly est fermé depuis cette semaine !)

A suivre …

Didgeridoo … A l’origine joué par les Aborigènes du Nord de l’Australie (Gros pipeau ?)

3 | Covid 19 Journal d’une Fleur dans les Terres Australes

Les journaux télévisés Français parlent des Français bloqués aux Philippines et en Thaïlande en ce moment. Les hôtels ferment et les hôtes sont mis dehors à cause du Coronavirus. L’ambassade en Thaïlande semble aux abonnés absents, mais c’est sans doute plus complexe que cela : La lorgnette des médias à un angle toujours serré… Pas grand chose au sujet des Français bloqués en Australie en revanche :

Vendredi dernier devait être un grand jour : le retour de ma fille d’Australie, billet payé en poche (euh dans sa boite mél, ils sont électroniques de nos jours). En consultant mon ordinateur, je vois que la compagnie ETIHAD AIRWAYS arrête tous ses vols ! A quelques dizaines d’heures près, elle et son copain passaient au travers du blocus décrété par le COVID19.

Maintenant, les rares billets disponibles sont à des prix astronomiques… Bien entendu ETIHAD AIRWAYS ne rembourse pas les vols, mais propose un avoir utilisable plus tard… Les vols reprennent (THEORIQUEMENT) 2ème quinzaine d’Avril. Bref ils sont coincés là-bas, au minimum un mois et demi. Acheter un autre billet devient un risque : par les escales ou les étrangers sont bannis, mais aussi le risque d’annulation en dernière minute sans remboursement en cash. La situation deviendrait alors catastrophique pour eux. Imaginez deux avoirs, donc deux vols annulés à la suite, les finances à sec…

Ils se sont inscrits sur SOSUNTOIT, au cas ou la situation empire.. A défaut d’un rapatriement d’état…

Pas simple, Travailleurs Visa Vacances-Travail / Working Holiday Visa, ils ont été les premiers sans travail et sans subsides.

Nous envisageons de les aider pécuniairement, un confinement en Australie coûte cher, mais c’est envisageable, pas d’autre solution…

Je leurs met à disposition Skype, le journal libération en numérique et Audible. Une façon de les préparer à un confinement forcé par dame nature… ou je ne sais quel pays qui ne sais pas faire joujou avec ses laboratoires !

Pour ne pas faire simple je ferai un billet demain ou mardi, sur mon autre fille, elle bloquée à HANOI au VIETNAM. ces jours-ci elle aurait du être au CAMBODGE, pour ensuite se projeter sur HONG-KONG et TOKYO, HONOLULU CHRISTCHURCH.

Covid 19 jour 9 du grand confinement (Mercredi)

La vie se fige aussi pour nos filles des terres lointaines (Vietnam et Australie) : Il n’y a pas que le Covid19 qui est unique cette année. Ces couples voyageurs, ces sauterelles voyageuses 🙂 (je ne sais pas comment elles ont attrapé cet autre virus : le voyage), elles ne sont pas seules, heureusement. Maintenant elles vont devoir apprendre le retour au temps long, au Slow Travel en somme, terme d’ailleurs très à la mode de nos jours.

Pour ma fille des Terres Australes ses « aventures » dans le Northern Territory (autant être coincée au fin fond de l’Australie n’est ce pas ?), ne font que commencer.

L’aînée est hébergée en ce moment à Hanoi dans un appartement prêté par une connaissance, pour un mois, et ainsi attendre que les communications rouvrent dans de bonnes conditions… Peut-être.

Si je résume bien elles ont en ce moment bien plus de libertés que nous. C’est toujours mieux d’être confiné au soleil non ? Et puis rentrer pour être coincé dans un appartement, est-ce mieux? Pour nous les parents, sans doute, mais le temps passe vite au final, soyons patient.

Ma belle sœur disait que nous sommes dans une période qui sera écrite dans les livres d’histoire, très probablement. Nous aurons alors, dans quelques années, de bonnes parties de rigolades au coin de la cheminée, en nous racontant des brides de vie… de celles qui sur le moment semblent dures, pour êtres racontées plus tard avec fierté ou humour.

« Qui a l’habitude de voyager… sait qu’il arrive toujours un moment où il faut repartir. »

Paulo Coelho
Labyrinthe Glendurgan @pixabay

2 | Covid 19 Journal d’une Fleur dans les Terres Australes

26/03/2020 Australie | Northern Territory | 32° C au plus fort de l’après-midi.

Aujourd’hui devait être le grand jour du retour en France ! Un petit vol jusqu’à Brisbane à bord d’un Fokker bien rustique (mon père aurait adoré !), puis une envolée de 14 heures vers les Emirats avec le confort d’ETIHAD, et enfin 07 heures pour rejoindre mon nid originel… En France.

La vague de panique est passée mais il reste encore pas mal de débris sur le sable.

En l’espace d’une ou deux nuits la moitié des occupants de la sharehouse (colocation très utilisée par les routards et les jeunes voyageant avec le programme Vacances-Travail (PVT), ou Working Holiday Visa) dans laquelle je vis sont partis, se ruant tous vers les fermes, dans l’espoir de grappiller le peu de travail qu’il reste. Les murs sont désormais placardés d’affiches expliquant les gestes barrière, une odeur de savon anti-bactérien flotte dans l’air, et des petites croix ont été installées à un mètre l’une de l’autre sur le sol des supermarchés. La pandémie se cache dans les détails car rien ne laisse deviner ici, à Alice Springs, que nous sommes au beau milieu d’une crise sanitaire mondiale. Le soleil brille toujours aussi fort. Les mouches sont toujours aussi survoltées. Le désert? Imperturbable. C’est le genre d’endroit où le chaos n’oserait pas pointer le bout de son nez… et pourtant.

«Don’t they know it’s the end of the world!»

Skeeter Davis

1 | Covid 19 Journal d’une Fleur dans les Terres Australes

24 MARS 2020 – Australie | Northern Territory | 0,16 hab./km2

De la Fleur des Terres Australes, 20 Ans : Ce matin je me réveille à 8h la boule au ventre mais je n’ose ouvrir les yeux qu’à partir de 11h. Quand finalement je décide de quitter le monde des rêves et de les ouvrir, une pluie de notifications alarmistes s’abat sur moi : « vol AUH-CDG annulé », « Ethiad annule tous ses vols internationaux » « 22,230 cas confirmés en France » La réalité ne connait pas les réveils en douceur. S’en suit un café au goût plus amer que d’habitude et une question traînant dans l’atmosphère alourdie « Et maintenant quoi? » Voilà comment une journée que je pensais passer à préparer mon sac pour le retour en France s’est transformée en journée « retour à la réalité » La réalité ne passe pas par quatre chemins quand elle décide finalement de s’exprimer, elle hurle.

La réalité, ma réalité, de fait, la voici: Je vis avec mon copain dans une share house comptant une cinquantaine de personnes, au milieu du désert australien et d’une pandémie mondiale rien que ça. Je passe mes journées à me frayer un chemin au milieu de cette cinquantaine de personnes, le cœur s’emballant à chaque raclent de gorge, à chaque toussotement que je pense percevoir. J’ai impression d’être la seule qui prend la mesure de la situation, la seule à appliquer les gestes barrières recommandés, à me laver les mains jusqu’à l’os. Appelez ça Paranoia, appelez ça réaction démesurée, mais que croire lorsque d’un bout à l’autre du monde le mot « Corona » (et c’est pas une marque de bière réputée…)change de couleur? Ici, il prend la couleur de l’argent, ne signifie pas maladie mais perte d’emplois et changement de plans. Là bas, il signifie pneumonie, hôpitaux surchargés et peuple confiné. Je ne parviens plus à digérer ma panique non partagée, la vision trouble, le cœur déchaîné je pars m’isoler. Une fois calmée, l’arrière goût dans ma bouche est celui de la culpabilité.

Je ne suis pas un cas à risque et je suis Française. Ces deux facteurs font sans doute de moi la personne la plus chanceuse de la cinquantaine de personnes avec qui je vis, et je suis pourtant la seule qui panique.

Un des éléments de cette équation n’est pas juste mais je ne parviens pas à discerner lequel. A suivre…