Un train pour dire adieu

In memoriam

« J’ai pensé qu’il valait mieux, se quitter sans un adieu… Que c’est triste un train qui siffle dans la nuit.. ».

C’est le 11 janvier 2021 que le train est parti pour toujours avec mon père à bord. Il nous a quitté ma sœur, mon frère et moi sans nous dire adieu. Il n’était pas seul. Il n’est pas parti a cause de ce virus qui court les rues, quoique… Il est parti à cause de l’enfermement qu’il a dû vivre, je suppose qu’il a préféré retrouver sa famille, sa mère, son père ses sœurs, ses meilleurs amis…

Nous lui avons dit au revoir le dernier dimanche de janvier. Ne pouvant nous déplacer en Espagne, nous avons sollicité le prêtre du village en France où il vécut  25 années de sa vie pour commémorer une messe en son nom. Nous avions besoin de marquer le coup, de nous retrouver autour de lui, de ses souvenirs. Nous nous sommes donc tous retrouvés là-bas.

J’appréhendais ce jour là, je n’arrivais pas à parler dans la voiture. J’ai revu les paysages de mon enfance. Les endroits où nous jouions, où il a travaillé, où il s’est assis pour fumer ses cigarettes, des gitanes maïs sans filtre.

Dans l’église, je ne me souvenais plus d’elle à l’intérieur, mais comme elle était belle ! D’une lumière douce et chaleureuse alors que dehors il faisait maussade et très humide. Ces portes anciennes, ainsi ouvertes nous a accueilli comme si nous nous étions à peine quitté. Elle était entretenue, fleurie et vivante. J’ai déposé un bouquet de fleurs pour mon père au pied de Ste Geneviève la patronne de l’église.

Le prêtre nous a accueilli chaleureusement, et il a commencé la cérémonie. A plusieurs reprises, il a nommer mon père. A chaque fois, j’ai  pleuré et je ne pouvais  plus m’arrêter. J’avais mon masque qui retenait quelques larmes et le souffle de la peine, de douleurs, mais ce n’était pas suffisant. Je n’étais pas la seule, je voyais mes enfants, mes neveux et nièces, ma sœur, mon frère, tous dans un état d’émotions extrêmes.

Nous savions tous que cette heure fatidique devait arriver. Elle est venue le 11 janvier 2021, nous étions plus ou moins préparés mais cela n’a pas empêché, les émotions, les larmes, les souvenirs de nous happer.  Nous avons prié, chanté pour lui, nous avons essayé de nous réconforter, de sourire à la vie. Nous  sommes ensuite retrouvés chez ma sœur. Ce n’était pas prévu puisque par les temps qui courent toute réunion familiale est proscrite. Mais nous ne pouvions pas nous quitter sans lui dire adieux à notre manière. Il aurait aimé ce repas improvisé autour de pizzas commandées. Il aurait aimé les films souvenirs que mon frère avait préparé. Il aurait eu milles et une anecdotes à nous raconter sur sa vie en France, de sa jeunesse.

Ma mère est devenue veuve, l’homme qui a partagé 58 ans de sa vie est parti dans le train sans lui dire à adieux. Elle n’avait pas la force de le voir ainsi.

« Adios, papa, te queremos, besico ».